27 mai 2015

La petite truie, le vélo et la lune

Aux yeux de Rosie la petite truie, aucun endroit n'est plus extra que la ferme où elle habite. On y trouve de tout pour être heureux : un carré de boue pour se prélasser, de la nourriture à volonté  et une porcherie délicieusement parfumée. Un véritable petit coin de paradis à porté de sabots. Un petit porcelet ne pourrait demander mieux. C'est exactement ce que croyait Rosie jusqu'au jour  apparut dans la cour un vélo rouge qui lui sembla une pure merveille. Elle passa des heures à observer les déplacements de cette rutilante mécanique et se dit à elle-même: Rien de plus facile! Je pourrais faire du vélo, moi aussi. La vie se transfigure aux yeux de la petite truie qui, non plus confinée à son carré de boue et à sa moulée, désire maintenant pédaler jusqu'au bout du monde. C'est le cœur emplie de ce tout nouveau rêve qu'une nuit, Rosie se glissa sans bruit hors de sa porcherie. Sous le regard bienveillant de la lune, son unique complice, elle enfourcha le vélo merveilleux et tenta de pédaler. Mais Paf! le vélo se renversa sur le côté. C'est plus compliqué que je ne l'aurai cru, pensa notre petite héroïne un peu déçue. Mais Rosie n'est pas un porcelet qui abandonne si facilement. Nuit après nuit, la lune est témoin du même manège et du même résultat catastrophe. Boum! contre le mur du poulailler. Plouf! dans la mare. Bang! le groin en plein dans le potager. Et si les ragots de la ferme étaient vraies? Si le vélo était une activité beaucoup trop difficile pour une petite truie? C'est à Rosie de leur prouver le contraire! 


L'été qui pointe finalement le bout de son nez me donne l'envie folle de plonger dans des lectures joyeuses, lumineuses et colorées. Je ressens définitivement le besoin de me perdre dans ce type d'histoire qui applique un électrochoc de bonheur à tous les petits coeurs recouverts d'une bonne couche de grisaille hivernale. C'est donc bien souvent à ce temps-ci de l'année que je replonge avec le ravissement d'une gamine dans ma collection d'albums jeunesses, redécouvrant touts ces titres qui ont su capter mon imaginaire. Une tasse de café à la main, j'explore ces univers haut en couleurs et, question de bien faire les choses, je me donne la permission de déguster chaque histoire. Rêver au contact de certaines pages, accélérer certaines parties, relire des extraits à voix haute et surtout, si l'envie me prend, de rire à gorge déployée. Rire si fort que mon chat doit trouver refuge sous le meuble de la télévision ( parce que oui, mon chat est une grosse poule mouillée). Lecture après lecture, je décèle dans certains albums de petits détails insoupçonnés qui me chavirent le cœur une nouvelle fois. Ce fut le cas de cet album particulier.

Un album que j'ai aimé du premier coup d’œil. Ces couleurs pimpantes m'attiraient, sa mise en page dynamique m'a enchantée. Puis je me suis mise à tourner les pages et l'histoire m'a littéralement conquise. Je me souviens m'être dit que les péripéties de cette petite truie à la tête dure serait idéales pour faire comprendre la persévérance à mes futurs enfants. Car si l'on doit accorder ne serait-ce qu'une seule qualité à Rosie, ce doit être de ne jamais baisser les bras. Il lui faut beaucoup plus qu'un postérieur dans la marre ou un groin enfoncé dans le potager pour la décourager de son rêve. Toujours elle revient à la charge avec en tête de nouvelles solutions constructives pour éviter un nouvel échec. Une attitude qui est tout à son honneur me direz-vous. Mais ce que je n'ai pas saisi lors de ma première lecture c'est la force de ce rêve qui la pousse à persévérer. Un rêve si beau qu'il repousse les limites du possible et ouvre de nouveaux horizons de possibilités. Car Rosie était une petite truie satisfaite avant qu'apparaisse dans sa vie le splendide vélo rouge. Jouer, manger, dormir, Rosie ne désirait rien de plus. Puis le vélo s'est immiscé dans son esprit et son regard a dépassé les limites de sa porcherie pour se voir pédalant jusqu'au bout du monde. Tout d'un coup Rosie est devenue beaucoup plus qu'une simple petite truie dont la seule aspiration est de se rouler dans la boue. Elle est devenue une fière cochonette possédant un rêve, aussi loufoque soit-il, qui la porte et la pousse plus loin qu'elle n'aurait osée l'espérer.




Je vous souhaite une chose chers lecteurs. Comme Rosie, donnez-vous le droit de rêver et les moyens de mener ce rêve à bon port. Avec une telle attitude, vous toucherez les étoiles et atteindrez la lune en un rien de temps.




                                                                        Vicky Sanfaçon




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